Bilan Anmary

Et bien dansez maintenant

« Dans son acception la plus générale, la danse est l'art de mouvoir le corps humain selon un certain accord entre l'espace et le temps, accord rendu perceptible grâce au rythme et à la composition chorégraphique. La danse est un art corporel constitué d'une suite de mouvements ordonnés, souvent rythmés par de la musique. La danse peut être un art, un rituel ou un divertissement. Elle exprime des idées et des émotions ou raconte une histoire. La danse a en général un rapport direct dans l'histoire avec les autres arts (musique, peinture, sculpture). Le corps peut réaliser toutes sortes d'actions comme tourner, se courber, s'étirer, ou sauter. En les combinant selon des dynamiques variées, on peut inventer une infinité de mouvements différents. Le corps passe à l'état d'objet, il sert à exprimer les émotions du danseur à travers ses mouvements, l'art devient le maître du corps… »

Les mots pour le dire

« J'écris pour pouvoir lire ce que je ne savais pas que j'allais écrire » - Claude ROY

« Écrire, c'est lire en soi pour écrire en l’autre » - Robert SABATIER

Impressions :

C’est avec beaucoup de plaisir que j’ai partagé cette aventure. J’aime échanger avec ceux qui m’entourent. J’ai tout d’abord parlé de confiance, mais au-delà du simple mot, il s’agit d’amitié, d’affinités et de plaisirs partagés avec sincérité, en toute simplicité. Si je devais le refaire, je le referais à l’identique, sans rien changer des sensations que je garde en moi et qui se construisent déjà comme des souvenirs intarissables. Nous n’avons pas fini de revivre ces moments de bonheur, ces quelques instants furtifs qui prennent tout leur sens dans notre propre histoire. Nous en reparlerons encore…

Après notre arrivée, nous avons fait le tour du lieu, visiter le théâtre qui nous a quelque peu impressionné par sa taille et son confort feutré. Nous avons pris nos marques dans chacun des recoins, couloirs, cuisine, petit salon, sale à manger, loges… Tous les ingrédients étaient réunis pour nous émerveiller. Un grand espace, de multiples interstices nous étaient réservés sans limites. Dans l’instant nous n’avons pas su quoi en faire, mais on pouvait déjà imaginer que les conditions étaient propices à notre bien-être.

Puis nous nous sommes retrouvés autour de la table pour se présenter, faire connaissance, commencer à s’apprivoiser. Les mots sortent facilement, mais ils ne dévoilent que peu de choses. Le plus souvent le discours cache plus qu’il ne montre. Alors il nous faut lire derrière les mots et faire preuve de patiente. C’est en demi-teinte que nous nous montrons, il y a ce qui se voit, se dit, se perçoit, se ressent. Tous ces filtres se superposent et ne laissent passer que peu d’éclairages et si peu de nous.

Lors de la première mise en scène, le voile est tombé progressivement. Il n’a pas été facile de se rencontrer malgré la beauté du lieu et nos nombreux échanges. Regards furtifs, mouvements mécaniques, ce fut un lent démarrage, plein de bonnes volontés. On veut s’ouvrir aux autres et pourtant, malgré tous nos efforts, on reste centrée sur nous-mêmes. Il fallait alors allier l’attention, l’ouverture, le mouvement, la coordination, le regard des autres… Toutes ces choses que nous traversons au quotidien sans trop se poser de question, et pour causes !

Puis chemin faisant, nos visages et nos corps se sont détendus, tout doucement sans véritablement nous en rendre compte, juste pour se découvrir, être ensemble, laisser nos émotions nous envahir petit à petit et enfin se faire plaisir. Quel spectacle !

Nous avons pu entrer en contact et nous toucher avec délicatesse en cherchant ce que l’autre peut accepter de prendre et ce qu’il peut donner, sans ingérences. Ces rapprochements n’ont pas provoqué les mêmes vibrations en fonction de cette subtile alchimie qui nous caractérise et qui nous rend uniques. Cette joie partagée nous a permis de tous nous croiser, de nous poser pour réussir à ne former qu’un seul corps créé à partir de chacun d’entre nous. Quelle harmonie !

Nous sommes tous fait de valeurs, d’émotions, d’énergie, de chaleur, de saveurs, d’odeurs. Une alchimie complexe qui contribue à nous repousser ou à nous attirer. Pour chaque cocktail, il nous fallait découvrir intuitivement les ingrédients qui nous convenaient le mieux pour ne retenir que ceux-là. Fructueuse recherche qui nous a permis de nous apprécier, nous entendre, nous comprendre, nous réunir.

Ressentis :

J’ai pu rester moi-même, sortir du carcan de la simple apparence. Il y a bien des fois où j’étais prise au dépourvu, ou les autres étaient présents pour apporter leur aide avec bienveillance. Chacun de nous pouvait mener la danse, en fonction de ce que nous sommes, avec respect.

J’ai pu dépasser quelques difficultés. J’ai commencé par ce qui me semblait le plus éloigné de moi, mais en vérité, tout était accessible. L’envie de ne pas en tenir compte, de laisser aller les choses comme elles viennent, avec quiétude. Cette possibilité était offerte par tous de laisser de côté les tabous, ou toutes les parties du corps pouvaient entrer en contact sans arrières pensés, sans craintes, tout doucement en préservant notre intimité.

J’ai tout d’abord alternativement, fui et recherché le contact, par le regard, par le corps, en fonction de l’attirance plus ou moins forte que je ressentais. Une attirance plus forte crée de la retenue, il m’a fallu surmonter cet obstacle. Je me suis évadée au contact des autres jusqu’à moins y penser. Puis j’ai laissé aller mes sentiments et sans m’en rendre vraiment compte le contact était possible. Enfin nos mains ont pu se poser l’une sur l’autre avec douceur dans la magie de l’instant. D’autres sensations ont suivi, intégrant cette pudeur nécessaire au dépassement de soi.

Le handicap visible ou non ne m’a pas gênée. Les corps blessés ne l’étaient plus, je ne les voyais plus, ils étaient là, explorant l’environnement avec tellement d’aisance. Chacun de nous trouvait l’autre sans effort, juste pour se sentir bien et partager quelque chose ensemble.

Parfois je me retirais quelques instants, je prenais du recul pour observer, puis l’attraction me ramenait inéluctablement vers les uns ou les autres. Des groupes se formaient, puis d’autres et d’autres encore jusqu’à ce que nous nous rapprochions tous pour mêler nos énergies. Toutes les parties du corps étaient sollicitées et touchées, sans savoir qui était précisément en contact avec l’une ou l’autre. Quelle confiance !

Méthode :

La danse, le mouvement ont permis la mise en relation et la possibilité de se dépasser, petit à petit, sans rien brusquer. Écrire au fur et à mesure de notre évolution personnelle et collective a été bénéfique pour s’approprier la démarche.

Mêler la culture et le handicap, mettre en adéquation l’expression de soi par la danse et l’écriture et les limites que le corps et l’esprit nous imposent est un concept qui mérite d’être développé.

Danse et écriture semblent bien s’entendre, cette alliance efface les différences. Chacun trouve sa place à sa façon, à son allure, dans l’un ou l’autre ou dans les 2.

Alterner un exercice de danse et écrire quelques mots permet de garder en mémoire une émotion, sur ce qui est fait, ressenti et de pouvoir partager à un autre moment, avec plus de recul.

Les consignes données permettent d’évoluer petit à petit, d’accéder à plus d’authenticité. L’ouverture et la fermeture du corps dans des mouvements centrés sur chaque partie, de la tête aux pieds, sont indispensables pour bouger avec plus de facilité, pour que les gestes se succèdent harmonieusement et qu’on y prenne plaisir.

Explorer le sol, l’espace, vivre en 3 dimensions donne du relief aux mouvements et aux rapprochements. Cela donne les moyens et l’envie d’entrer en contact avec les autres.

Il n’y a pas de niveau de performance ni d’objectif annoncé, la bienveillance est de mise. Chacun peut fonctionner à son rythme, peut se voir, se regarder, se sourire, se sentir, se toucher, porter de l’attention, s’isoler et se sentir libre. Pas de fatigue superflue, le bien-être de chacun est préservé.

Les regroupements autour d’une table sont des moments privilégiés pour partager les impressions. Les temps d’écriture permettent de se poser, de se recentrer. La lecture à haute voie des textes réalisés est particulièrement intéressante pour livrer un peu de soi. Les émotions exprimées doivent êtres gérées pour que chaque participant puisse se sentir à l’aise afin de bien vivre les émotions parfois trop vives.

Travail sur les vertèbres :

Un des exercices portait sur les vertèbres, définies comme centrales, reliant l’ensemble des autres parties du corps, tête, bras, bassin, jambes... Le temps de palpation des vertèbres, alternativement, de l’un et de l’autre était une véritable découverte. Il fallait allier l’attention, la douceur et la délicatesse pour à la fois ressentir et faire ressentir des vibrations et partager les énergies. Le dos contre le dos dans un roulement de vertèbres permet de créer une fusion chaleureuse permettant de fonctionner comme un seul corps en mouvement.

Ouverture et fermeture du corps :

La démonstration faîte sur l’ouverture et la fermeture du corps a aidé à mettre en place des mouvements mieux coordonnées, plus simples d’accès. Porter de l’attention sur chacune des articulations à permis une bonne prise de conscience du repli sur soi et de l’ouverture aux autres.

Écrire sur les parties du corps :

Écrire sur les parties du corps est drôle et créatif. Tous les participants recherchent une partie du corps de l’autre pour écrire quelque chose. Au fur et à mesure chacun joue avec les autres et petit à petit un groupe se forme. Les positions prisent par chacun pour laisser l’accès aux autres est de plus en plus libre et véritablement épanouissant.

Lecture des textes en mouvement :

Le choix était donné de poser le texte réalisé sur un des objets qui étaient préalablement éparpillés sur la scène. Il fallait allier le mouvement et la lecture d’une phrase, d’un mot…

Fond musical :

Les premiers exercices se sont déroulés sans musique afin de se centrer plus spécifiquement sur le corps. C’est à la demande que le fond musical a progressivement pris sa place. Le choix des morceaux était adapté, il faut qu’ils soient doux à l’oreille et qu’ils puissent accompagner le mouvement dans un rythme simple et harmonieux. C’est finalement un bon choix de ne pas commencer avec du son.

Réalisation d’un texte :

À partir des informations notées au fur et à mesure des exercices réalisées, de poésies lues à haute voix, de photos observées, de sensations ressenties, la création d’un texte est un moment intense de travail sur soi et de partage avec les autres lors de la lecture par chaque participant.

Anmary

14 mars 2010